Fâcheuse tendance à vouloir tout rentrer dans des cases

L’actualité médiatique de ces derniers temps a créé une onde de choc dans l’opinion publique, suscitant un profond désarroi jusqu’au sein même de notre électorat.

C’est dans ce contexte que les journalistes de l’émission Quotidien de TMC ont récemment décidé de « s’engager pour un Parlement plus transparent » et contacté députés et sénateurs afin de réunir les positions de chacun à destination du public.

Bien que l’intention soit louable, le format me semble inadéquat.

En effet, sensible au sujet, j’ai voulu répondre sans tarder, pensant qu’à question ouverte, on pouvait répondre de façon précise.
Hélas, pour le moment, il nous est demandé de répondre uniquement par l’affirmative ou la négative afin de constituer une carte interactive avec des réponses simplifiées. Ce qui explique que sur la carte présentée par Quotidien, certaines questions soient affichées comme non répondues sur la fiche portant mon nom.

Il me semble impossible de traiter un tel sujet qui touche à des fondamentaux comme l’état de droit, la séparation des pouvoirs et la liberté d’exercice de mandat en répondant juste Oui ou Non, surtout si la question est approximative.

De ce fait, dans un souci de transparence, j’ai décidé de publier ici les questions et mes réponses qui s’obstinent à ne pas rentrer dans les cases.

1/ Accepteriez-vous qu’une institution indépendante et externe contrôle les comptes du Parlement ?

Si l’on parle de comptes du Parlement, il faut être plus précis. L’Assemblée nationale et le Sénat, chacun de leur côté, ont un budget annuel qui fait l’objet d’un suivi, comme tous les comptes publics.

N.B. L’Assemblée nationale et le Sénat préparent séparément leur projet de budget annuel sous l’autorité de leurs questeurs. Puis une commission commune, composée des questeurs des deux assemblées (six au total) et présidée par un membre de la Cour des comptes, lui-même assisté de deux magistrats de la Cour ayant voix consultative, arrête le montant des crédits nécessaires au fonctionnement de chaque assemblée tel qu’il sera inscrit au projet de loi de finances. Un rapport explicatif établi par la commission commune est annexé au projet de loi.

2/ Accepteriez-vous qu’une institution indépendante et externe contrôle les dépenses liées à l’exercice de votre mandat ?

Sur le principe, oui, aucune objection, mais il faut distinguer deux choses :

  • au cours des dernières années, on a beaucoup versé d’encre sur les prétendus enrichissements personnels de certains élus, ce qui a engendré un climat de suspicion très délétère, et souligné que les moyens de contrôle sont à parfaire dans leur fonctionnement, pour atteindre réellement l’objectif de transparence sans virer au voyeurisme.
  • les moyens mis à disposition des élus pour exercer leur mandat font déjà l’objet de contrôles par l’administration. Je ne suis pas opposé à ce qu’ils le soient davantage, ou différemment, mais il faut veiller à ce que l’élu – en particulier parlementaire – puisse exercer son mandat librement, sans avoir à justifier les priorités qu’il se fixe.
3/ Êtes-vous pour ou contre l’interdiction de l’embauche d’un membre de sa famille comme collaborateur(trice) parlementaire ?

POUR, je suis défavorable aux interférences manifestes : je considère que le mandat au suffrage universel est personnel, et que le conjoint ou les proches ne doivent pas y être associés, autrement que par les conséquences qu’il a sur la vie de la famille. Quant à la notion de famille, elle est bien trop vague. Dès lors que l’on n’est plus dans le lien direct, à mon sens, il n’y a plus aucun obstacle déontologique.

N.B. Afin d’être plus précis, je suis contre l’embauche d’un membre de la famille qui inclut les premiers et seconds degrés de parenté.

4/ Pour la prochaine campagne des législatives, êtes-vous prêt à vous engager pour un Parlement plus transparent ?

OUI, mais pas de n’importe quelle manière. Je crois qu’un des sujets qu’on élude systématiquement, et qui touche aux fondements même de notre démocratie, est celui du renouvellement démocratique. Je suis personnellement FAVORABLE à la limitation des mandats dans le temps. Je pense qu’une telle mesure permettra tout à la fois de limiter les abus, de développer une conception plus saine de l’exercice du mandat, et de rendre notre démocratie plus ouverte et plus tonique, de permettre à des citoyens plus jeunes de briguer les responsabilités, d’encourager des avancées sur le statut de l’élu et son retour à la vie active et civile une fois les mandats échus. J’ai déposé à l’Assemblée nationale une proposition de loi limitant à deux le nombre de mandats qu’un individu peut faire dans la même fonction. Je la défendrai de toutes mes forces, et qu’elle soit votée ou pas, me l’appliquerai à moi-même.

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Pour conclure, je déplore que nous vivions dans un monde bien trop dépolitisé, au sens de l’implication citoyenne. Dans cette présidentielle, slogans simplistes et promesses électorales remplacent hélas le vide sidéral laissé par l’absence de programmes solides, complexes par nature, nécessitant introspection et débats de fond.

Bien que je tienne à saluer l’initiative de Quotidien qui sort de ses habitudes de l’infotainement, je considère que les média tout autant que les politiques ont leur rôle à jouer pour sortir de l’endémie du « tous pourris » et cela devrait commencer par arrêter de vouloir faire rentrer tous les points de vue dans des cases fabriquées à l’avance.

[box close= »false » color= »#d6d4e8″ icon= »ioa-front-icon info-circled-2icon- » ]Mise à jour du 2 mars 2017:

Finalement la carte de Quotidien intègre maintenant les réponses complètes. Sûrement n’étais-je pas le seul à le demander, peut être trop d’élus refusaient de répondre à cause de cela ? Il faut reconnaître au moins que Quotidien a su entendre que les questions politiques ne sont pas binaires et qu’en tout état de cause, ce médium a su sortir des cases formatées.

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